Depuis le 26 septembre, la galerie Cécile Fakhoury de Dakar accueille Stasis, une expo dédiée aux sculptures-tableaux de Sadikou Oukpedjo. Dans ce qui est sa troisième exposition personnelle majeure, l’artiste togolais revient à nouveau sur sa vision de l’« animalité humaine ». Un thème qu’il met, cette fois-ci en corrélation avec des sujets comme la religion, le conflit intérieur et la crise morale.
Stasis : de l’art sur fond de philosophie nietzschéenne ?
Même s’il ne l’affirme pas ouvertement, les œuvres de Sadikou Oukpedjo sont fortement empreintes de philosophie. A travers ses différentes créations, l’artiste matérialise en effet une vision du monde actuel, pleine d’interrogations où se bousculent des hypothèses et des raisonnements très proches de la doctrine nietzschéenne. En effet, pour l’artiste, l’Homme est animé par le besoin irrépressible de croire en quelque chose, en une puissance supérieure qu’il ne peut saisir, afin de justifier son existence et d’en tirer l’essence. Dans cette démarche, il devient ainsi un « fabricateur de Dieux ».
Malheureusement, dans cette recherche du surnaturel et du divin, l’être humain en est venu à avoir plus d’amour pour un hypothétique au-delà qu’il n’en a pour se alter-ego. À travers l’exposition Stasis, Oukpedjo soulève donc divers questionnements existentialistes et pousse à une prise de conscience à propos des nouvelles idoles que l’homme s’est créé et qui régissent le monde contemporain : l’argent, la consommation de masse et la religion.
Pour Sadikou Oukpedjo, cette démarche aboutit à sortir des méandres de la séduction et de l’effroi pour créer de nouvelles mythologies, faisant intervenir des dieux dont le règne n’est pas basé sur la peur et l’exploitation.
Qui est Sadikou Oukpedjo ?
Né en 1975 à Ketao au Togo, Sadikou Oukpedjo a commencé à dessiner à l’âge de 4 ans. Son talent a très tôt été identifié par ses instituteurs du primaire qui lui confiaient alors la reproduction des cartes de géographie et des organes du corps humain. Cela lui a permis d’affiner très rapidement sa technique de dessin.
Au collège, il découvre la sculpture grâce à son professeur d’éducation physique et sportive qui l’invite à l’aider à travailler sur la création de statues en papier mâché. Quelques années plus tard, Sadikou Oukpedjo quitte sa ville natale pour se rendre à Lomé, la capitale. En 1998, il intègre l’atelier de Paul Ahyi, artiste plasticien togolais de renom, auprès duquel il fait ses armes et perfectionne son art. En 2010, il quitte le Togo et s’installe au Mali où il a l’occasion de côtoyer Ludovic Fadaïro, plasticien béninois alors en résidence dans le pays. Mais en 2013, à cause de la guerre qui secoue une partie du Mali, il quitte Bamako pour s’installer en Côte d’Ivoire, pays où il vit encore aujourd’hui.
Spécialisé dans la création de sculptures-tableaux aux messages forts, Oukpedjo a participé, au cours des dernières années, à plusieurs grandes expositions collectives, dont la célèbre foire 1-54 (Londres 2017 et Marrakech 2020). Ses œuvres ont également été présentées à la Biennale de Dakar en 2014 et étaient programmées aux expositions OFF de la Biennale de Dakar 2020. Sadikou Oukpedjo a par ailleurs, à son actif, deux précédentes expositions majeures, respectivement intitulées Anima et Silentium.
L’exposition Stasis est ouverte à la galerie Cécile Fakhoury jusqu’au 20 novembre 2020.