Décoloniser les espaces : Réécrire les marges de l’histoire au centre de l’exposition Style Congo

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ayoh kré Duchâtelet, Ornaments and Crimes (Detail), 2023. © ayoh kré Duchâtelet
ayoh kré Duchâtelet, Ornaments and Crimes (Detail), 2023. © ayoh kré Duchâtelet

L’exposition « Style Congo. Heritage & Heresy », organisée par Sammy Baloji, Silvia Franceschini, Nikolaus Hirsch et Estelle Lecaille, se tient au CIVA à Bruxelles, en Belgique, jusqu’au 03 septembre 2023. Elle explore les politiques de représentation et d’appropriation culturelles à travers des interventions artistiques et architecturales contemporaines et des documents historiques issus des collections du CIVA. L’exposition retrace la représentation du Congo dans les expositions internationales et coloniales organisées entre 1885 et 1958, en utilisant l’Art nouveau comme point d’ancrage.

Le mouvement belge, également appelé Style Congo, a coïncidé avec l’exploitation du Congo par le roi Léopold II et reflète une fascination généralisée pour les matériaux et les formes exotiques. Les pavillons des expositions internationales et coloniales illustrent la synthèse des arts à laquelle aspirait le modernisme, créant ainsi un précédent pour les présentations dans les musées ethnographiques. Ils ont servi de plateforme de propagande culturelle et d’échanges économiques.

L’exposition examine les marques de la colonisation dans la ville de Bruxelles et dans le paysage urbain congolais, proposant une resignification décoloniale des espaces privés et publics, cherchant à réécrire les marges de l’histoire au centre. Les positions artistiques et architecturales contemporaines de l’exposition remettent en question les histoires canoniques et les racines coloniales de ce patrimoine, et avec elles la perception des bâtiments qui sont devenus des icônes de la culture belge.

Congolisation (2023), du studio d’architecture bruxellois Traumnovelle, est une installation qui met en lumière la manière dont les architectes belges se sont appropriés et ont emprunté la culture matérielle et la nature congolaises à travers une chronologie des représentations du Congo dans les expositions internationales. Des œuvres d’art de Judith Barry, Rossella Biscotti et Ruth Sacks créent des liens supplémentaires avec différents pavillons historiques. L’œuvre de Biscotti, Congo Congo Bruxelles Brussel (2007), examine la topographie coloniale de l’Exposition internationale de Bruxelles de 1935 en juxtaposant le pavillon du Congo et le pavillon de la ville de Bruxelles. Un autre pavillon, conçu par Paul Hankar pour l’exposition internationale de Bruxelles à Tervuren en 1897, est évoqué dans l’installation vidéo de Barry, The Work of the Forest (1992), qui traite du colonialisme européen en Afrique comme moteur de l’accumulation des richesses en Belgique.

Les liens entre le colonialisme et l’Art nouveau sont donc explorés dans cette exposition qui remet en question l’histoire coloniale et culturelle de la Belgique, tout en proposant une resignification décoloniale des espaces urbains et des espaces d’exposition.

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