L’exposition « L’Heure du Regard » d’Ousmane Niang, présentée à la galerie AFIKARIS à Paris jusqu’au 4 janvier 2025, plonge le spectateur au cœur des tensions sociopolitiques et économiques mondiales. Fidèle à sa démarche engagée, l’artiste sénégalais dévoile une série d’œuvres qui résonnent comme un appel à la réflexion, mettant en lumière les conséquences des inégalités et de la corruption sur les individus et les sociétés. En utilisant des médiums variés et une approche métaphorique, Ousmane Niang invite à baisser les yeux pour observer les réalités sociales souvent ignorées.
Une critique visuelle des élites et du système politique
Inspiré par le film « Atlantique » (2019) de Mati Diop, Ousmane Niang transpose avec subtilité les dynamiques de pouvoir et d’exclusion sociale à travers des œuvres saisissantes. Ses personnages, habillés de costumes sur-mesure et fixant l’horizon d’un regard détourné, incarnent l’indifférence des élites envers les souffrances populaires. Les scènes de corruption et d’accords officieux qu’il dépeint (« Accord politique, 2024 ») dénoncent les travers d’un système où l’intérêt personnel prévaut sur le bien commun.
Pour Ousmane Niang, ces figures incarnent un pouvoir déconnecté de la réalité. Ses œuvres appellent ces dirigeants à « baisser les yeux », à sortir de leurs palais pour affronter les vérités sociales et écouter les voix des populations qu’ils gouvernent. L’artiste fait écho à un cri de détresse collective, celui de ceux qui se sentent contraints à l’exil face à un avenir bouché.

Au-delà de la critique, Ousmane Niang propose une vision constructive. Dans ses œuvres, les clous enfoncés dans le bois symbolisent la masse humaine, reliée par des liens de solidarité. Cette métaphore visuelle met en lumière la nécessité d’une action collective pour faire face aux fléaux contemporains. Il exhorte les citoyens à valoriser leurs ressources naturelles et compétences individuelles pour construire un avenir meilleur, sans se résoudre à l’exil.
Les trois piliers qu’il met en avant — le travail de la terre, la connaissance et l’apprentissage d’un savoir-faire — forment les fondations d’une économie durable. Ces éléments, à la fois simples et universels, apparaissent comme des réponses aux inégalités systémiques. Les œuvres de Niang, bien qu’imprégnées d’humour et de satire sociale, délivrent un message clair : la transformation passe par l’union et l’engagement communautaire.

Une esthétique unique : entre abstraction et figuration
Né en 1989 à Tamba, au Sénégal, Ousmane Niang a su développer une signature artistique distinctive. Maîtrisant le pointillisme et les formes anthropomorphes, il crée des compositions qui oscillent entre abstraction et figuration. Sa capacité à intégrer différents médiums, tels que le plexiglas et le contreplaqué, lui permet d’explorer de nouvelles dimensions esthétiques.
Dans « L’Heure du Regard », les détails minutieux de ses œuvres captivent le spectateur tout en servant une narration puissante. Chaque élément devient une métaphore, témoignant de sa maîtrise technique et de son engagement conceptuel. Son style, à la fois accessible et complexe, résonne profondément avec les enjeux qu’il aborde.
Avec cette exposition, Ousmane Niang confirme son statut d’artiste engagé et visionnaire. En confrontant des problématiques globales à des solutions locales, il incarne une nouvelle génération d’artistes africains qui redéfinissent les contours de l’art contemporain. Son travail révèle une sensibilité profonde aux enjeux sociaux et économiques tout en offrant des perspectives d’espoir et de transformation.
« L’Heure du Regard » n’est pas seulement une exposition ; c’est une invitation à repenser notre rôle dans la société et à envisager un avenir fondé sur l’éthique, la responsabilité et l’engagement communautaire. En cela, Ousmane Niang ne se contente pas de créer de l’art — il crée un dialogue.

