Jusqu’au 14 Janvier 2024, la Tate St Ives, à Londres, au Royaume-Uni, se tiendra la toute première exposition majeure dédiée à la Casablanca Art School. Cette école d’art révolutionnaire, dont l’approche audacieuse a proposé une nouvelle culture visuelle suite à l’indépendance du Maroc en 1956, est mise à l’honneur. Reflétant une nouvelle conscience sociale, les artistes-professeurs tels que Farid Belkahia, Mohamed Chabâa et Mohamed Melehi ont transformé cette institution en encourageant les expérimentations artistiques, en s’éloignant des traditions académiques occidentales et en s’inspirant de la culture locale existante. Cette exposition explorera la façon dont les enseignants et les étudiants de la Casablanca Art School ont combiné les compétences, les matériaux et les langages visuels traditionnels berbères avec les influences modernistes de l’Europe et de l’Amérique du Nord, créant ainsi un espace pour réimaginer l’art contemporain marocain et sa relation avec la vie quotidienne.
Travaillant dans des domaines tels que la peinture, la sculpture, le graphisme, la peinture murale architecturale et bien d’autres médias, les artistes associés à cette école ont placé l’art dans l’espace public et l’ont promu comme une expérience partagée. Cette exposition phare rassemble les œuvres d’une vingtaine d’artistes, notamment des peintures abstraites et vibrantes, des fresques urbaines, des objets artisanaux, de la typographie, des graphismes et de la céramique, ainsi que des archives d’imprimés rarement vus, des journaux d’époque et des photographies.
L’exposition mettra en évidence la façon dont les principaux représentants du groupe ont dépassé les styles et les enseignements occidentaux, encourageant les étudiants à explorer l’art abstrait et à renouer avec la culture afro-arabe. Farid Belkahia, nommé directeur de la Casablanca Art School, a élargi l’équipe enseignante en incluant Mohamed Melehi et Toni Mariani (à partir de 1964), Bert Flint (à partir de 1965) et Mohammed Chabâa (à partir de 1966), marquant ainsi des années mémorables de progrès artistique. Ce réseau d’artistes s’est inspiré de l’école d’art du Bauhaus, qui abolissait les distinctions entre l’art, l’artisanat, le design et l’architecture, et a réimaginé sa vision dans un contexte afro-berbère.
En revenant sur les moments clés du développement du mouvement, les visiteurs de l’exposition découvriront comment le groupe a expérimenté des pratiques interdisciplinaires pour former une nouvelle perspective, donnant ainsi naissance à une nouvelle vague de création avant-gardiste qui fusionnait des influences provenant de formes décoratives, mouvantes et écrites. Une plateforme importante a été l’exposition Plastic Presence, qui s’est tenue en plein air sur la place Jemaa el-Fna à Marrakech et sur la place 18 Novembre à Casablanca, et qui demeure un tournant significatif dans l’histoire de l’art marocain. D’autres expositions marquantes seront explorées, telles que l’exposition étudiante de 1968 qui s’est tenue au Pavillon du Parc de la Ligue Arabe. Cette exposition a marqué l’apogée de l’innovation et de la créativité collective ; les expériences multiculturelles du personnel enseignant et des étudiants ont créé une nouvelle perspective pour l’ère postcoloniale.
Dans les années 1970, le mouvement a continué de croître et l’influence de l’école s’est répandue de plus en plus loin. La Biennale d’art arabe de Bagdad de 1974 a réuni plus de 600 œuvres, dont celles des artistes de la nouvelle vague de l’art marocain. Parallèlement, le premier Moussem-Festival Culturel d’Asilah en 1978, co-fondé par Mohamed Melehi et Mohamed Benaïssa et s’étendant sur les espaces civiques de la ville d’Asilah, reste l’un des nombreux legs durables de l’activisme culturel de la Casablanca Art School.
Cette exposition exceptionnelle met en lumière la Casablanca Art School, un mouvement artistique révolutionnaire qui a joué un rôle clé dans la redéfinition de l’art contemporain africain. Loin des influences occidentales, les artistes de cette école ont su puiser dans les traditions locales et réimaginer l’art dans un contexte afro-berbère. À travers une variété de médias et d’approches, ils ont créé une nouvelle perspective qui a ouvert la voie à une ère postcoloniale de créativité et d’innovation au Maroc. L’exposition offre une occasion unique de découvrir ces œuvres marquantes et de comprendre l’importance de la Casablanca Art School dans le paysage artistique mondial.