Utilisant l’art pour dénoncer les problèmes liés à la cohabitation entre les cultures occidentale et orientale, l’artiste franco-algérien consacre ses travaux à la réparation et à la quête d’identité culturelle. Il s’agit pour Kader Attia d’un moyen lui permettant de réparer les injustices et traumatismes dont il a été victime pendant son enfance, afin d’éviter des situations similaires à d’autres enfants.
Artiste engagé, il suscite la réflexion sur l’idée de la réparation en tant qu’acte à la fois physique et symbolique. Ceci pour examiner concomitamment la façon dont la réparation se rapporte aux dommages mentaux, corporels et aux chocs collectifs et exclusifs. C’est pourquoi, en collaboration avec des psychiatres, des ethnographes, des historiens et d’autres praticiens, il réalise des films sur les thématiques telles que les génocides, la colonisation, la modernité, le capitalisme et la schizophrénie. Diplômé de l’École Nationale Supérieur des Arts Décoratifs de Paris, il est préoccupé par le rétablissement de ce qu’il appelle « l’aliénation culturelle ».
Kader Attia va plus loin dans sa démarche de réparation en créant en 2017, « La Colonie barrée ». Cet espace dédié à la réflexion sur la décolonisation, aussi bien des personnes que des connaissances, des attitudes et des pratiques. Cette initiative vise à réunir sans distinction aucune, la création artistique et intellectuelle de toutes les identités et toutes les histoires, avec en particulier celles des minorités. « La Colonie barrée » soutient à cet effet, les actions communautaires et les minorités ethniques. L’artiste défend cette initiative en affirmant que l’on ne peut prétendre changer le monde en un claquement de doigts.
Bercé dans son enfance par un multiculturalisme au sein duquel se côtoient religions catholiques, juives et musulmanes, Kader Attia est orienté vers la pratique des arts par son professeur de dessin. Après son baccalauréat, il va s’initier à l’école Duperré où il obtient son diplôme en 1993, avant d’intégrer l’école des Beaux-Arts de Barcelone en 1994.
C’est au Congo-Brazzaville que sa carrière artistique décolle avec l’exposition, au Centre culturel Français de Brazzaville de ses premières œuvres sur le thème « Humanistes au Congo ».
Aujourd’hui, l’artiste philosophe Kader Attia privilégie la photographie, l’installation, la vidéo et la sculpture comme médium. Il s’inspire des travaux anthropologiques de Claude Lévi-Strauss dans la réalisation de ses œuvres mais également ceux de Michel Foucault, comme par exemple son œuvre « Construire, déconstruire, reconstruire : Le Corps utopique ».
Il fait office de poète à travers ses différentes expositions et s’écarte des atrocités qu’attirent les œuvres à caractère politique pour se consacrer à la réparation sociale et culturelle.
L’humaniste africain à la tête de la Biennale de Berlin 2022 !
Nommé curateur à la tête de la 12ème édition de la Biennale d’art contemporain de Berlin pour son engagement pour la restitution des biens culturels, ses analyses sur les impacts de la crise sanitaire et ses travaux antérieurs, notamment ceux relatifs à la dénonciation politique, Kader Attia estime que les erreurs du passé doivent nous servir à inventer un monde meilleur.
L’artiste qui, dans son parcours a abordé plusieurs thématiques, notamment la politique, la réparation, les relations entre les pays colonisés et l’occident, la restitution des biens culturels de l’Afrique, les crises économiques, les impacts de la pandémie de la Covid-19…, pourrait orienter les productions artistiques de la prochaine Biennale de Berlin sur les thématiques relatives à l’actualité sociopolitique notamment la crise sanitaire et ses corollaires (la crise économique, l’anxiété, l’accentuation des inégalités …).
Par cette nomination, Kader Attia devient le premier artiste africain qui occupera le poste de commissaire de la biennale de Berlin. Il se retrouve ainsi au rang de grands noms tels que l’artiste italien Maurizio Cattelan, le performeur et vidéaste polonais Artur Żmijewski, ou encore la colombienne María Berríos, l’ayant tous précédé.
Kader Attia : Une première exposition personnelle en Grèce avant la Biennale de Berlin
En attendant la 12ème édition de la Biennale d’art contemporain de Berlin, Kader Attia présente du 07 mai au 19 juin 2021 sa première exposition personnelle au State of Concept à Athènes.
Le franco-algérien pose son regard critique sur les maux qui minent la société actuelle et se penche sur les questions qui relancent le débat relatif aux problèmes du monde ainsi que le prolongement des impacts négatifs de l’impérialisme et du colonialisme sur les sociétés non occidentales. Il rassemble ainsi ses photographies et vidéos pour construire un discours analytique sur les possibilités pour les sociétés marginalisées de reprendre possession de leur culture.
Pour cette exposition, Kader Attia a puisé au sein de ses anciennes réalisations mélangées aux nouvelles productions pour créer une exposition originale. Il présente quelques œuvres telles que Reason’s Oxymorons, et son nouveau film The Object’s Interlacing (2020), dans lequel il aborde la question de la restitution des biens africains, la situation des réfugiés particulièrement chère pour la Grèce.