Autrefois sous-estimé, l’art contemporain africain occupe désormais une place prépondérante sur la scène artistique internationale grâce à l’approche évolutive et novatrice des artistes du continent. Joana Choumali, artiste ivoirienne contemporaine, fait partie de cette cohorte d’artistes d’exception qui contribuent à la mise en valeur de cet art ancestral en lui insufflant une touche de contemporanéité pour l’adapter à cette ère qui se veut moderne et créative.
Née en 1974 à Abidjan, Joana Choumali est une artiste plasticienne qui a débuté sa carrière en tant que directrice artistique dans une agence de publicité, avant de se consacrer à sa passion pour la photographie. Bien que son cheminement artistique en tant que photographe ait commencé tardivement, son intérêt pour ce medium remonte à son enfance, marqué par une séance de portrait de famille réalisée par un photographe de studio local.
Influencée par cette expérience et par la photographie traditionnelle en noir et blanc du XXe siècle, Joana Choumali a officiellement embrassé la photographie en tant que forme d’expression artistique. Son travail documentaire s’inspire des réalités africaines et de diverses cultures à travers le monde. Dans sa pratique, elle explore et analyse différentes perspectives pour nourrir une vision du monde à la fois riche et diversifiée.
Les premières œuvres de l’artiste contemporaine se distinguent par son intérêt pour documenter les divers mouvements en Afrique qui entremêlent tradition et modernité. Ses séries photographiques, telles que « Aube« , reflètent ce désir d’archiver les souvenirs et de tisser des liens entre le passé et le présent, offrant un moment de transition magique à travers les différentes villes qu’elle explore, notamment Abidjan, Accra, Casablanca et Dakar. Par exemple, sa série « Haabre : La Dernière Génération » illustre cette fusion entre tradition et contemporanéité en abordant la disparition progressive de la pratique ancestrale de la scarification faciale chez les Burkinabés à Abidjan, en Côte d’Ivoire.
L’attentat survenu à Grand-Bassam a offert une nouvelle perspective créative à son art. En effet, l’artiste ivoirienne s’est rendue sur les lieux, autrefois un havre de paix associé à des souvenirs joyeux de son enfance et de réunions familiales, désormais marqué par la tragédie et le traumatisme. En examinant les images prises in situ avec son iPhone, l’artiste ivoirienne a eu l’idée de les broder pour établir un lien tactile plus profond avec ces images et rendre hommage aux victimes. Bien qu’elle ait expérimenté la broderie sur photographie pour la première fois à Ifitry, au Maroc, en 2015, c’est suite à cet événement qu’elle l’a adoptée comme un processus alternatif de création d’image et comme une forme de thérapie pour surmonter le traumatisme. Cette approche novatrice lui a valu le prestigieux Prix Pictet en 2019 pour sa série « Ça va aller« , axée sur le thème de l’Espoir.
Aujourd’hui, Joana Choumali propose des photographies conceptuelles et des techniques mixtes qui ajoutent une profondeur émotionnelle supplémentaire à ses œuvres. En 2016, l’artiste ivoirienne a officiellement intégré le textile à sa pratique photographique, en brodant directement sur les images capturées, dans un processus additionnel de création de l’image, réalisé avec des gestes lents et rêveurs. Ses œuvres récentes se distinguent par des accessoires particuliers, enjolivés par le choix des textiles et sa sensibilité à la couleur.
Elle poursuit ses explorations photographiques du monde qui l’entoure et continue d’incorporer le tissu dans ses nouvelles créations. Le résultat reste toujours aussi captivant, avec des œuvres délicates empreintes de rêveries, où le réel et l’imaginaire se mêlent dans un processus d’intériorisation profonde. Ses séries d’œuvres « Translation » et « Albahian » illustrent cet univers utopique immersif.
Joana Choumali a eu l’opportunité de présenter son travail lors de nombreuses expositions à travers le monde, qu’elles soient individuelles ou collectives. Parmi ses expositions personnelles, on peut citer des lieux prestigieux tels que la Gallery 1957 au Ghana, la Beurs Van Berlage aux Pays-Bas, la 50 Golborne Gallery au Royaume-Uni, et la Sperone Westwater aux États-Unis. En Côte d’Ivoire, ses œuvres ont été exposées au Musée des Civilisations, à la Fondation Donwahi pour les Arts Contemporains, à la Rotonde des Arts et au Palais de la Culture. Sa série « Adorn« , qui explore la manière dont les femmes africaines contemporaines réinterprètent les standards de beauté occidentaux, a été présentée au pavillon de la Côte d’Ivoire lors de la 57e Biennale de Venise.
Son travail a également été inclus dans des expositions collectives de renom, notamment à la Royal Academy of Arts au Royaume-Uni, au Musée d’art contemporain africain Al Maaden au Maroc, au Musée Zeitz d’art contemporain d’Afrique en Afrique du Sud, et au Musée d’Histoire Naturelle en France. L’artiste contemporaine a également participé à une exposition itinérante internationale, passant par des lieux tels que le Victoria and Albert Museum au Royaume-Uni, le Daikanyama Hillside Forum au Japon, la Mouravieff-Apostol House & Museum en Russie, ainsi que des destinations à Zurich, Shanghai, Dublin, Monaco et Milan.
Son rayonnement international s’est poursuivi avec sa participation à des événements majeurs tels que la Biennale Photoquai au Musée du Quai Branly à Paris, au Troppenmuseum à Amsterdam, au Zeitz Museum of Contemporary Art Africa à Capetown, à la Fondation Blachère, à la Biennale Internationale de la Photographie de Bamako, et au Lagos Photo Festival. En reconnaissance de son talent, Joana Choumali a remporté le POPCAP14 International Photography Award en 2014 ainsi que l’Emerging Photographer LensCulture Award. En 2016, elle a été lauréate de la Magnum Emergency Grant Foundation et du Fourthwall Books Award en Afrique du Sud, et a publié son livre « HAABRE » à Johannesburg la même année.
Joana Choumali est une artiste contemporaine talentueuse dont le travail apparaît à l’international notamment dans de nombreuses expositions individuelles et collectives, témoignage de la reconnaissance de son talent et de l’impact de son art sur le monde de artistique contemporain. L’artiste ivoirienne continue d’inspirer et d’émerveiller son public à travers le monde, affirmant ainsi sa place parmi les artistes contemporains africains les plus prometteurs de sa génération.