Dans le sillage de l’ouverture à différents récits à travers des œuvres intimes et personnelles, tout en mettant en scène les histoires prédominantes, créant une contre-histoire véhiculée par le pluralisme des récits normaux individuels au FRAC Nouvelle-Aquitaine Méca à Bordeaux de février à novembre 2021, dans le cadre du Focus Femmes de la saison culturelle Africa 2020 coordonné par N’Goné Fall pour l’Institut français, l’exposition « Memoria : récits d’une autre Histoire » s’annonce du 7 avril au 21 août 2022 au Musée des Cultures Contemporaines Adama Toungara d’Abidjan. Elle a été organisé dans le cadre du projet d’itinérance qui vise à retrouver la création contemporaine d’Afrique et des diasporas, tout en faisant découvrir les artistes de talent réunis sur le territoire africain et dans le monde afin de partager leurs créations au public.
L’exposition « Memoria : récits d’une autre Histoire » présentera en terres africaines des œuvres d’artiste dont certains sont encore rarement exposés sur le continent africain, comme Georgina Maxim avec ses installations textiles, Na Chainkua Reindorf avec ses installations textile et perles, Enam Gbewonyo avec ses installations textile ou Tuli Mekondjo avec ses toiles et vidéo.
Cette exposition mettra également en lumière des œuvres réalisées par des artistes mondialement reconnus comme Joana Choumali avec ses photographie et ou broderie textile, ou des artistes émergents comme Carine Mansan avec ses installation et sculpture, Marie-Claire Messouma Manlanbien avec ses installations et photographie, Myriam Mihindou avec ses performance vidéo, Gosette Lubondo avec ses photographies, Josèfa Ntjam avec ses vidéos et installation textile, Selly Raby Kane avec ses vidéos 3D, LaFalaise Dion avec ses performance vidéo, Rachel Marsil avec ses peintures et Valérie Oka avec ses dessins et peintures, qui ensemble encapsuleront la possibilité d’une mémoire agrégée faite d’un tas de récits, d’histoires, de questionnements et de rencontres dissipés dans nos souvenirs individuels, particuliers, intimes. Une pensée ici qui se dévoile à travers les tentatives de nous renvoyer à la reconstitution d’un tout typique, d’un tout répandu, qui recharge notre perspective sur la création contemporaine de l’Afrique et de ses diasporas.
L’exposition « Memoria : récits d’une autre Histoire » nous interroge sur la parole et la mémoire qui sont négligées, tuées, éradiquées ou raccourcies, pour mettre au jour un contre-compte, faire coïncider des histoires plurielles et découvrir l’implicite qui se transforme en une crise à laquelle chacune des artistes répond, de sorte que leurs œuvres se distinguent par leur désir de déraciner les limites de l’art, d’unir l’ailleurs et de montrer la variété de nos histoires individuelles et finalement collectives.
Les œuvres choisies pour cette exposition constituent une excursion qui réverbère, d’une part, une exploration démystifiée de pans de l’histoire et de manières acceptées de penser le continent africain et, d’autre part, la manière dont certains imaginaires fonctionnent actuellement, notamment dans les domaines de la finance et de la réaffectation des ressources.
À travers cette variété, les œuvres témoignent du sérieux de l’acte de création des artistes et offrent la puissance de leur histoire ancrée dans leurs géologies changeantes et dans leur temps. En scrutant les composantes de notre raisonnement, « Memoria : récits d’une autre Histoire » espère ouvrir un discours sur notre capacité à rétablir notre perspicacité, à prêter attention à diverses histoires et à aborder notre processus de pensée pour un avenir formé de la même manière, où nos souvenirs, nos voix intérieures et nos inconscients sont enfin réconciliés et apaisés.
« Memoria : récits d’une autre Histoire » : un parcours à triple pivot
De l’intime à l’universel
La section principale de l’exposition s’intéresse aux différents moyens utilisés par les artistes pour découvrir, à partir de leurs propres rencontres ou d’indices, un ensemble de souvenirs.
Les œuvres-mémoire de l’artisane zimbabwéenne Georgina Maxim, des pièces matérielles hétérogènes liées personnellement à des personnes et à leur mémoire, seront présentées, ainsi que les toiles illusoires et significatives de l’artiste namibienne Tuli Mekondjo, dans lesquelles se mêlent des thèmes végétaux, des graines et des subtilités de photos authentiques du patrimoine public de la Namibie.
Les œuvres de la ghanéene Enam Gbewonyo, exposées précédemment en France, constituent un temps fort de l’exposition. C’est la charge de nylon « couleur chair », un article privé et courant, que l’artiste décide d’utiliser comme image du déséquilibre et de l’invisibilisation. Cette imagerie équivalente du collant est organisée par la franco-gabonaise Myriam Mihindou qui, avec sa performance enregistrée, La Robe envolée, nous transmet par la parole et par son corps, un récit d’une incroyable puissance, chargé de vers.
Les photos brodées de Joana Choumali appellent à la contemplation et à la perception de la nature pour traquer le réconfort, la force et la confiance. Rachel Marsil, à travers une toile brillante, chargée de souvenirs chers, tire les ficelles de la mémoire et des liens familiaux. Enfin, l’expérience atroce de la vie trouve son importance dans l’écoulement de l’étrange et de la rigueur dans l’œuvre intimiste de Carine Mansan.
Quand la mémoire fait œuvre politique
La deuxième section de l’exposition interroge la critique fondamentale de la mémoire : la manière dont les artistes l’utilisent comme stratégie de réprobation, notamment dans les questions liées à l’orientation, à la représentation du corps noir ou à la compensation des biens culturels.
Pour la photographe Gosette Lubondo, l’obligation de mémoire permet d’analyser librement un pan de l’histoire pionnière de son pays, la République démocratique du Congo. À travers la série « Imaginary Trip II », qui montre tranquillement l’incapacité des indices du passé, l’artiste trouve le moyen de nous faire entrevoir la résurgence concevable d’un autre ensemble d’expériences.
C’est également à travers l’imagerie du cauris, qui observe la grandeur et la sacralité dans les créations de LaFalaise Dion, que le visiteur est invité à réfléchir à la signification de la protection de l’héritage culturel. Valérie Oka, dans une méthodologie comparable, exprime le besoin de redonner leur importance, leur énergie et leur capacité aux articles du continent, dispersés dans les musées du monde. En coulisses, c’est également leur décontextualisation et leur mise en situation avec un objet d’embellissement basique que l’artiste censure.
Fabulations, fictions et autres imaginaires
Enfin, la troisième et dernière partie du parcours, lève le voile sur un futur inventif, franc, solide d’une mémoire attendue et célébrée.
Un échange sans limites entre l’art, la science, les nouvelles avancées et une forme d’activisme social, terrain fertile pour la composition d’histoires créatives et subversives. Ces nouveaux dialectes concoctés par la franco-camerounaise Josèfa Ntjam qui rend compte de la modernité dans chacune de ses installations, photomontages ou manifestations plastiques.
La ghanéenne Na Chainkua Reindorf qui à travers des œuvres sculpturales consolident des matériaux naturels, ou encore la sénégalaise Selly Raby Kane, qui imagine une capitale africaine fantasmée dans son film 3D « L’autre Dakar ».
Enfin, le guide comme véhicule de projection dans le passé et le futur, comme le propose Marie-Claire Manlanbien dans des agencements riches en composants, matériaux et articles emblématiques de l’héritage culturel ivoirien. Considérant ces cartes comme des livres ouverts, le visiteur est projeté dans sa fugacité préférée.
« Memoria – récits d’une autre Histoire », est ouverte jusqu’au 21 août 2022 au Musée des cultures contemporaines Adama Toungara à Abidjan.