Dans une présentation artistique immersive et empreinte de nostalgie, Pamela Enyonu dévoile « Ateker, ijasi biyayi ? – Greetings from the road (A dedication)« , une exposition qui marque son retour dans son pays d’origine. Installée au prestigieux Amassaka Gallery, cette exposition se tiendra jusqu’au 21 avril 2024. Première exposition individuelle de l’artiste Pamela Enyonu en Ouganda, elle offre une opportunité unique au public ougandais de découvrir l’art novateur de cette artiste renommée.
Reconnue pour son exploration approfondie de la féminité à travers son art, l’artiste contemporaine analyse la manière dont les femmes naviguent les paysages sociaux et interagissent avec leur environnement au quotidien, mettant en lumière les influences mutuelles entre elles et leur cadre de vie. « Ateker, ijasi biyayi ? – Greetings from the road (A dedication) » présente une vision artistique de l’histoire de l’Ouganda selon le regard et la compréhension de Pamela Enyonu. L’exposition mêle ses créations passées à de nouvelles œuvres explorant les récits nationaux et la quête identitaire. À travers ses toiles, l‘artiste ougandaise revisite ses racines diverses dans un pays dont les frontières ont été tracées par d’autres, où la cohésion est un enjeu perpétuel de négociation.
Les créations de Pamela Enyonu s’inspirent de divers éléments, tels que ses interactions sociales, les mythes fondateurs imprégnant son quotidien, son identité ougandaise et ses lectures éclectiques, incluant des auteurs tels que Okot p’Bitek, Maya Angelou, Chinua Achebe et Frantz Fanon, pour n’en citer que quelques-uns. En s’immergeant dans le roman « Kintu » de Jennifer Nansubuga Makumbi, Pamela Enyonu puise une source d’inspiration pour créer des œuvres exclusives en accord avec sa démarche artistique. Plutôt que de déconstruire ces mythes pour les reconstruire, l’artiste contemporaine les sublime en des récits qu’elle inscrit dans le présent, explorant ainsi les ruptures et les continuités.
L’exposition « Ateker, ijasi biyayi ? – Greetings from the road (A dedication) » transporte le spectateur dans un univers où les récits anciens prennent vie à travers le regard contemporain de Pamela Enyonu. La déesse Nambi, vêtue d’un débardeur bleu et tenant une poignée de graines dorées, émerge du seuil brumeux entre divin et terrestre, captivant le regard par ses yeux profonds. À ses côtés, l’arbre de la connaissance (du bien et du mal) déploie ses fruits dorés, évoquant un autre mythe de création dont l’impact sur la vie actuelle des Ougandais a redéfini leur trajectoire le long d’une ligne temporelle incertaine, entre un passé lointain et un avenir inconnu.
À travers ses œuvres exceptionnelles, Pamela Enyonu interroge la construction d’une communauté et soulève la question de l’identité collective post-coloniale. Elle invite le public à explorer les subtilités qui façonnent le sentiment d’appartenance, offrant des échappatoires entre l’intime et le collectif. Les tapisseries de l’artiste, arborant des dessins botaniques de Matooke dans ce qu’elle nomme « Social Nature Studies« , se lisent comme une déclaration d’amour envers les aliments qui tissent le tissu social. Une paire de pantoufles devant un écran allumé, sans âme en vue, évoque le murmure distant d’une famille qui a peut-être partagé les dernières nouvelles avant de se disperser pour vaquer à d’autres occupations. En scrutant son quartier en banlieue de Kampala, le regard de Pamela Enyonu glisse sur les toits émergeant derrière de hautes clôtures surmontées de barbelés, censés assurer la sécurité mais qui en réalité sectionnent la communauté qui forge le foyer.
Dans l’œuvre de l’artiste contemporaine, le concept de « chez-soi » est exploré à la fois comme un lieu d’appartenance et d’aliénation. Face à un monde devenu étranger et hostile à la vie, Pamela Enyonu s’efforce de narrer des récits et de contempler la sérénité comme remède. À travers une écriture féminine débordante, elle fait tournoyer sa narration sans contrainte, fatiguée de dicter des discours, exprimant des vérités dans une polyphonie de langues. Sensuelles, exubérantes en couleurs, riches en textures et en transparences, chacune de ses pièces est une invitation à l’exploration.
Cette exposition ne constitue que le premier chapitre d’une saga à plusieurs volets qui se dévoilera dans le futur, explorant en profondeur les thèmes abordés ici. Débutons par une dédicace : un hommage aux Ougandais et à l’Ougandité dans toute sa diversité et ses paradoxes, n’ayant de compte à rendre à personne. Elle résonne avec les mots de Wole Soyinka : « Un tigre ne proclame pas sa tigritude. Il bondit. » À travers cette exploration visuelle et narrative, l’exposition incarne une réappropriation de cette « tigritude« . À partir de là, de nouvelles explorations sont envisageables.